A3

Bonjour !

Ce sixième numéro de A3 a été réalisé entre octobre et novembre 2022. Le thème Territoire a été retenu par l'équipe salariée de La Tréso pour servir de fil rouge à la création de ce numéro. Des temps de travail collectif ont ensuite été organisés avec la communauté du lieu. Les contenus ont été réalisés conjointement par les membres de Tréso et par le collectif A3. 

Contributions > Gregoire, Kanine, Laurence, Océane, Emilie, Mariela, Stephane,
Antonin, Julie, Hugo du collectif A3

Typographie > Today & Totem Remix
Graphisme > Hugo (A3) _xiao.grosso_

CUISTO EDITO LUDO SONO PHARO HISTO MODELO MICRO TUTO BIENTÔT VERSO

La Tréso se veut un projet ouvert.

Ce qu’on y fait vient de la communauté, travailleur.ses, contributeur.trice.s, simples usager.es.
Mais ça ne doit pas rester une intention, ça se développe au quotidien :
accueil, sourire, écoute, discussion, disponibilité, avoir le temps (!).

Un de nos moment pour cela : la « Marmite coopérative », un temps régulier collectif.
20 à 30 personnes, sociétaires, contributeur.rices, habitant.es, acteur.rices locaux,
simples curieux.ses, s’y retrouvent pour contribuer à des sujets importants de notre lieu,
et c’est là que prennent vie beaucoup de projets.

Mais la force du tiers-lieu, c’est que les sujets qui en émergent, débordent rapidement vers
l’extérieur du lieu. Deux vélo-cargos transportent les biodéchets de la cantine pour devenir
compost dans les jardins partagés, transportent des invendus de l’Amap pour être distribués
à des migrant.es, ou sont loués par des particulier.es. On nous sollicite pour monter une cabane à outils d’un jardin partagé ou pour fabriquer un meuble pour le Théâtre. On accueille un festival sur l’alimentation ou des conférences scientifiques. Les artisan.es y montent un projet de stands partagés sur le marché, etc.

Bref le tiers-lieu infuse tout un tas d’actions
sur son territoire, c’est réjouissant
et ça ne fait que commencer!

Découvrir les lieux à travers des entretiens avec celles et ceux qui les fréquentent

Entretien avec Kanine - résidente à La Tréso 

Bonjour Kanine ! 

Tu peux nous raconter un peu ce que tu fais ?
Je suis brodeuse, couturière, réparatrice et « sur-cyleuse ». Mon activité comprend une grande part d'empirique, de tests, d'échantillons. Je prends des morceaux de tissus, des fils et j'en fais des trucs et des bidules. Petit à petit je sélectionne, je trie et j'en fais quelque chose : des tableaux textiles, des objets de décoration, des accessoires ou je m'en sers pour réparer des vêtements. J'aime beaucoup repriser et raccommoder de manière festive et créative, montrer qu'on peu être écoresponsable, réduire notre consommation et être un peu fun et sexy.

Qu’est ce qui t’a conduite à cette activité ?
J'ai un parcours de bidouilleuse-manuelle. Je n'ai pas fait d'études artistiques ni artisanales. J'ai une licence de biologie cellulaire et je suis professeure des écoles depuis 15 ans. Je viens d'une famille très manuelle. Avec du recul, je pourrais dire une famille de « makers ». Mes parents venant de milieux pauvres ou issus de l'immigration avaient cette culture de la débrouille et le plaisir de faire soit même. J'ai toujours vu tout le monde bricoler, coudre, tricoter, broder, réparer, repriser et créer à la maison. Je suis passée par la couture, par la peinture, par le collage. J'ai fini par avoir tous ces petits bouts tissus à la maison, en particulier des tissus rapportés de voyage et par mixer différentes techniques pour en faire quelque chose.

Je me suis par la suite formée à la broderie d'art au lycée professionnel Octave Feuillet et au sashiko de façon autodidacte.

Depuis combien de temps tu es résidente à la Tréso ?
Je suis en résidence à La Tréso depuis son ouverture en septembre 2020. C'est la première fois que je pratique mon activité dans une lieu collectif.

Qu’est-ce qui t’y a amenée ? 
Le hasard. J'ai rencontré Grégoire, un des co-gérants de La Tréso et responsable des ateliers dans un espace de co-working à Malakoff où il animait des ateliers de fabrication. Je ne connaissais absolument pas l'univers des tiers lieux et des fablabs. Je me suis retrouvée à animer la file d'attente de repaircafés en proposant de broder des patchs de réparation pour les jeans. Je le suis rendue compte que mes activités très personnelles avaient en réalité un sens.

Une journée à la Tréso ça ressemble à quoi ? 
Aucune journée ne se ressemble, c'est bien tout l’intérêt d'un Tiers-Lieu, mais elles sont en générales faites de rencontres, de découvertes et d'émulation collective.

Tu proposes des petits tutos sur les réseaux, la transmission fait partie de ton travail ? Est-ce que la Tréso te sert aussi de lieu de transmission ? 
J'ai en effet mis quelques petits tutos sur les réseaux, très peu encore mais c'est quelque chose que j'aimerais avoir le temps de développer. Pour l'instant j’anime surtout des ateliers et des stages à La Tréso de broderie créative, de sashiko, de boro et de reprisage. Ce ne sont pas des cours avec de grandes techniques à apprendre. L'objectif est plutôt d'apprendre à faire soit même, de se libérer avec du fil et d'une aiguille. Ça doit être mon côté prof de maternelle, comme quand on apprend à faire du découpage collage, à tracer des lignes à faire du graphisme et à composer. J'essaie surtout de transmettre des techniques un peu rapides, ne pas avoir de projets trop longs, trop ambitieux, ce que j'appelle les « projets boulets » qui nous mettent en échec.

Tu as appris des choses depuis que tu es ici ? Des nouveaux outils/ machines/ techniques ? 
Mon défi est de varier mes outils . Au début ma démarche était très dans la bidouille. La rencontre avec des artisans devient très intéressante pour élargir ma vision. Je teste régulièrement la broderie sur d'autres matières comme le bois. Au fur et à mesure, j'essaie de me documenter sur les techniques de reprisage, j'ai beaucoup de difficultés. On trouve beaucoup d'informations sur la broderie et la broderie d'art, mais on arrive vite à la conclusion qu'on trouve peu d'infos sur le reprisage car c'est trop souvent considéré
comme un travail de bonne femme ou de pauvre. D'où un engagement féministe que l'on peut retrouver dans certains de mes tableaux textiles et notamment dans la série de portraits « Bonnes Femmes », J'ai trouvé quelques belles choses dans les manuels scolaires des années 1850, Je me suis formée à la broderie sashiko, une technique traditionnelle japonaise de reprisage, de matelassage, et d’embellissement reconnue. Je trouve également des petits trésors dans d'autres pays et en particulier en Russie. J'ai récemment découvert un petit fablab russe qui récupère des crochets de métiers à repriser de l’époque soviétique et que re-fabrique les pièces en bois et les boites avec les machines que nous avons ici à La
Tréso comme la découpeuse laser. C'est assez rigolo de faire des liens comme ça autour de la fabrication.

En dehors de ton travail de création et de transmission, tu prends part à d’autres activités du lieu ?
Je fais partie de conseil coopératif de La Tréso. J'essaie de participer au maximum aux projets collectifs comme la décoration, les ateliers ouverts, les Escape Games ou au collectif « Une histoire à Malakoff ».

Comment est-ce que tu résumerais l’intérêt que tu trouves à être à La Tréso ?
La découverte de techniques, l'entraide, la rencontre du public, lui permettre de réapprendre toutes ses techniques, de se décomplexer par rapport aux activités créatives et manuelles, J'aime le fait que dans les fablabs ont fasse du beau et de l'utilitaire en même temps.

Merci !

Retrouvez le travail de Kanine :
https://www.instagram.com/kanine.mending/

Découvrez le modèle de fonctionnement d'un lieu, présenté par les équipes qui le portent.

La Tréso - Tiers-Lieux Coopératif

Histoire du lieu 
L'envie de la création de la Tréso est née de la rencontre entre un tiers-lieu de Malakoff, Casaco, et une association dédiée à la fabrication et à la réparation Les Fabriqueurs

Aux débuts Casaco se présentait comme un espace de coworking organisé sous forme de coopérative. Mais il y avait déjà un contact avec des artisan.es, et il existait un besoin pour un lieu dédié à la fabrication. Aurélien Denaes (Casaco) qui avait entendu parlé du projet des Fabriqueurs les contacte : “Faut qu’on se rencontre ! Installez-vous dans le garage !”

Et voici en 2016 un petit fablab dans le garage de Casaco. On y trouve déjà des artisan.es mais pas uniquement, les particulier.es aussi étaient intéressé.e.s et fréquentaient le lieu. (30-40 adhérent.e.s).

Six mois plus tard, Aurélien Denaes propose de répondre à l'appel à participation de la Ville "Malakoff et Moi"  avec un projet qui est celui de la Tréso. Le bâtiment est alors vide, l’endroit sert de stockage aux archives de la Ville, son architecture et sa décoration n'ont quasiment pas bougé depuis les années 1960... Il y a beaucoup de travaux à faire pour le transformer en lieu d'accueil des publics (ERP).

Pour que le projet soit compris et accepté par la ville, la Tréso se présente d'abord comme lieu de valorisation de l'artisanat. Les élu.e.s pouvaient avoir peur du côté “start up nation” d'un projet de fablab et de tiers-lieux, mais rapidement les deux parties s’entendent, et adoptent un langage commun. En 2017 la création d'une Société Coopérative d'Intérêt Collectif est proposée pour faire vivre le futur lieu. Plusieurs subventions permettent le lancement du projet en assurant le coût des travaux et des aménagements, dont le montant total s'élève à 2 340 000 euros.

Les porteur.euses du projet inspiré par la démarche de Patrick Bouchain demandent une e maîtrise d'usage pour permettre de faire entrer les futur.e.s usager.ère.s dans les lieux dès le début du projet et de les impliquer dans la réflexion sur l'aménagement du bâtiment. L’association Les Fabriqueurs passe même un été dans le lieu avant les travaux. 

Manque de bol, le COVID frappe de plein fouet au moment où le lieu s'apprête à ouvrir ses portes. Heureusement pour cette période le budget avait été bien construit et iels avaient, sans mauvais jeu de mot, assez de trésorerie pour passer la pandémie. La Tréso réussit tout de même à ouvrir entre le premier et le deuxième confinement. Malgré ces difficultés la crise aura aussi  paradoxalement contribué à démontrer à toutes et à tous l'intérêt que peuvent représenter les fablabs sur un territoire et à les visibiliser avec la fabrication et la distribution de matériel pour les soignants. 

Quatre ans sont écoulés depuis l'idée formulée dans le garage de Casaco et l'ouverture officielle de La Tréso. Une éternité qui passe en un rien de temps. Aujourd'hui, défini comme tiers-lieu de vie, de fabrications culinaires, numériques et artisanales, le beau bâtiment en briques rouges est ouvert à toutes et à tous.

Modèle éco 
Investissement 
- 2 Millions de travaux par la Ville avant ouverture 
- 340 k d'investissements initiaux (aménagement, outils, matériel...), dont 50% pris en charge par la Région, le reste emprunté (banque et France Active).
 
Fonctionnement 
- RH : Une dizaine de travailleur.euse.s, touchant 1 à 1,6 équivalent du SMIC. 
- Charges fixes (dont loyer à 42k/an)
- Provenance ressources 1/Vente Bar et Restaurant 2/ Subventions sur projet 3/Privatisation 
4/Adhésions et vente autres services

Modèle Juridique 
Société Coopérative d'Intérêt Collectif :  51 sociétaires répartis en 3 collèges (usager.ère.s, travailleur.se.s, partenaires) un 4ème collège avec les supports/soutiens.  Les parts varient en moyenne entre 20 et 100 euros. ( entrée à partir de 20 euros) .

Publics
Habitant.e.s et travailleur.euses du coin sont client.e.s du restaurant et du bar
Particuliers pour les ateliers fablab
Artisans pour la partie pro et résidence 
Jeunes en insertion sur des programmes de formation

70 à 80 adhérent.e.s sur la partie ateliers particuliers.
2000 +/- de personnes par mois. 

Gouvernance
Aujourd’hui les décisions prises par l’équipe en co-direction (3 personnes), la direction rend des comptes à un conseil coopératif tous les mois ou tous les deux mois. Le conseil peut également interpeller directement les co-directeur.trice.s.

Le conseil coopératif est composé de sept personnes élu.e.s par une élection sans candidats lors de l’assemblée générale qui regroupe l’ensemble des coopérateur.trice.s une fois par an.

Pour l’avenir iels souhaitent faire évoluer le modèle vers encore davantage de place laissée au collectif dans la prise de décision, avec la création d’un conseil d’administration qui deviendrait l’espace décisionnaire auquel seraient subordonnés les co-directeur.trice.s. 

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